Les Halles de Schaerbeek
— Brussels —

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La chirurgie comme pratique sexuelle ? Is surgery the new sex? (Boris Gibé)

par/by Martin Zicari

 

FR

Imaginez : vous entrez dans une pièce circulaire et sombre. Une faible lumière éclaire ce qui semble être une table d'opération peu commune. En attendant que le spectacle commence, d'étranges instruments et outils sont disposés sur la table, comme un indice de ce qui va se passer.

Le premier acte est toujours le plus fascinant. Une architecture étrange, ressemblant à un grand Panopticum Anatomique, apparaît devant vous. L'illusion du cosmos remplit la pièce. Flottant dans l'espace, entourés de particules de lumière et de poussière, les instruments semblent se mouvoir d'eux-mêmes. Qui voudrait voir un corps livré à de tels instruments ? Certains ressemblent au scalpel, d'autres semblent plus proches de l'univers du plaisir, des formes et textures d'un désir à décoder.

Vient ensuite Vénus, son passage de déesse à cadavre, de la maison du Verseau à celle du Scorpion. Elle est suspendue dans les airs, le corps auréolé d'un halo phosphorescent. Un être céleste, offert au plaisir des yeux, prend lentement place au centre du théâtre anatomique. La table et les instruments semblent fleurir de sa présence : ils sont prêts à la toucher. La vue est à la fois large et détaillée, et tandis que le corps s'ouvre, que les organes sortent les uns après les autres, un nouvel ordre du monde prend forme peu à peu.

Les œuvres de Boris Gibé, L'ABSOLU et ANATOMIE DU DESIR, capturent cette tension entre beauté et grotesque, désir et réalité. Elles nous confrontent à la crudité de nos corps, à la vulnérabilité de nos désirs et à notre inéluctable mortalité. Nous sommes confrontés à notre matérialité, à nos désirs et à nos peurs. Nous embrassons la beauté et la complexité d'un désir déviant.

Dans cette pièce sombre, composée d'instruments étranges et de désirs désincarnés, l'opération chirurgicale est plus qu'un simple geste médical. Elle est un moyen d'explorer les recoins les plus sombres de la psyché humaine, un moyen d'exprimer les désirs les plus profonds de l'âme. En quittant cet espace étrange et troublant, le public se demande quels autres désirs peuvent être encore explorés.

Dans une scène glaçante du film "Les Crimes du Future" (Cronenberg, 2022), Timlin, qui est sexuellement attirée par Saul, exprime son désir d'être sculptée chirurgicalement par lui. Pour elle, "surgery is the new sex." (*)

 

ENG

Picture this: you enter into a circular darkened room. Only a dim light illuminates what appears to be an unusual surgical table. Waiting for the spectacle to begin, strange instruments and tools are laid out on the table as an index of what’s about to happen.

The first act is always the most mesmerizing. A strange architecture, resembling a grand Panopticum Anatomique, appears before you. The illusion of the cosmos filling the room. Floating in space, surrounded by particles of light and dust, the instruments appear to be moving by themselves. Who would want to see a body surrender to such instruments? Some resemble the well know scalpel, but other look eerily closer to pleasure, shapes and textures of an unravelling desire.

Next came the Vénus, in her final transit from goddess to corpse, from the house of Aquarius to that of Scorpio. She appeared suspended in mid-air, her body glowing with a phosphorescent halo. A celestial being, offered up for viewing pleasure, slowly takes her place in the center of the anatomical theater. The table and the instruments, appear to bloom with her presence: they are ready to touch her. The view is at the same time wide and detailed, and as we see the body of the venus being wide open, organs coming out one after the other, we can also glimpse to a new world order in the shaping, one organ at a time.

The works of Boris Gibé, L’ABSOLU and ANATOMIE DU DESIR, captured this tension between beauty and grotesque, between desire and reality. They confront us with the rawness of our bodies, the vulnerability of our desires, and the inevitability of our mortality. We are asked us to confront our own physicality, our own desires and fears, and to embrace the beauty and complexity of the deviant longing.

For in that darkened room, surrounded by the strange instruments and disembodied desire, it was clear that the surgery had become something more than a simple medical procedure. It had become a way to explore the darkest corners of the human psyche, a way to express the deepest longings of the soul. And as the audience left that strange and unsettling space, they were left to wonder what other deviant desires might be waiting to be explored.

In the chilling scene of ‘Crimes of the future’ (Cronenberg, 2022) Timlin, who is sexually attracted to Saul, expresses her desire to be surgically carved by him. Surgery is indeed, as she proclaims, “the new sex.”

 

(*) La chirurgie est une nouvelle pratique sexuelle.